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La ville de Rabat: une patrimonialisation inedite au Maroc
Posted By Comitato di Redazione On 1 luglio 2024 @ 02:57 In Cultura,Società | No Comments
CIP
di Mohamed Rami [*]
Introduction
Capitale du Royaume du Maroc, la ville de Rabat s’est mise à exister sur la carte du monde. Elle fut inscrite le 29 juin 2012 «Patrimoine mondial de l’humanité» lors de la réunion à Saint-Pétersbourg du Comité du Patrimoine Mondial de l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (UNESCO). Cette déclaration de classement à l’unanimité a permis à Rabat de célébrer en même temps – et ce pour la 1ère fois au monde arabe – son «passé arabo-musulman» et le «modernisme occidental» que représente l’architecture de l’époque coloniale – telle que conçue par le premier Résident Général de la France au Maroc, Lyautey, et ses architectes-urbanistes, dont Henri Prost [1].
Ayant reconnu Rabat «Capitale moderne et ville historique», cette décision de classement par l’Unesco a reconsidéré la composante patrimoniale de la ville, cristallisée auparavant par la médina, pour déclarer la « valeur universelle exceptionnelle » du bien moderne relatif au tissu contemporain de la ville, bâti durant les premières années du Protectorat français. A forte valeur architecturale et civilisationnelle, ce tissu urbain du début du 20ème siècle est qualifié par le Programme Euromed Heritage de «Patrimoine partagé» (Mutual Heritage). Il est considéré, de fait, comme l’une des caractéristiques de l’identité méditerranéenne.
Avec cette consécration, le Maroc tout comme l’Éthiopie – faisant partie des plus vieilles Nations du monde – devient le premier pays africain qui possède le plus grand nombre de sites classés au Patrimoine de l’Humanité [2]. Constitué de médinas [3] plusieurs fois centenaires, comme en atteste le classement mondial de la ville de Fès en 1981 ou encore la place Jamaâ El Fna à Marrakech comme premier site culturel [4] inscrit dans le monde [Knafou 2012], le pays consacre cette fois un patrimoine urbain moderne à forte valeur historique et civilisationnelle [5] en dehors des remparts de l’époque médiévale.
Partant, l’ambition de cet article est de comprendre cette nouvelle forme de patrimonialisation qui met en avant une nouvelle perception associée à deux tissus urbains appartenant à des cultures différentes, (traditionnelle et moderne). La procédure d’inscription étant établie par l’Unesco, institution « mondialisante», notre propos consisterait tout d’abord, en l’étude des connaissances scientifiques en la matière dans le contexte de la mondialisation afin de mobiliser les différents corpus de données relatives au patrimoine et ses proliférations sémantiques et conceptuelles. Nous allons prendre comme point de départ de notre démonstration, la définition rédigée par S. Bourgeat et C. Bras [2019] dans le site Géo-confluences: «le phénomène de patrimonialisation désigne ce processus de création, de fabrication» [6]. Une définition certes, concise mais, qui permet de mieux orienter notre développement vers une acception qui privilégie le processus de patrimonialisation plutôt que les descriptions et l’inventaire.
Ainsi, afin de compléter la compréhension du processus, l’analyse de l’approche scientifique s’est inscrite au périmètre urbain constitué par le centre-ville de Rabat pour voir comment ce territoire stimule la relation de cause à effet entre «mémoire» et «histoire», deux notions qui peuvent autant se compléter que s’opposer [Somé & Simporé. 2013]. Le but étant de pouvoir révéler les continuités ainsi que les ruptures en lien avec la production de ce «nouvel urbanisme».
Notre approche tiendra donc, à privilégier la lecture symbolique dans le sens qu’écrivait J.-P. Lévy [1987] à propos du centre-ville:
Aussi, cette orientation sera confortée par un travail d’observation pour examiner le tissu urbain afin de réinterroger les valeurs architecturales et urbanistiques attachées à cet héritage. L’objectif est de mesurer à la lumière de ce qui précède l’intérêt historique, culturel et civilisationnel du bien inscrit et en déconstruire les notions canoniques de «pérennité», d’«authenticité», d’«intégrité», d’«inaliénabilité» et d’«universalité» accordées par l’équipe Unesco chargée de ce dossier. Cet exercice sera étayé par des entretiens et entrevues pour rendre compte des problématiques sous-jacentes de la gestion patrimoniale de la ville de Rabat (Direction du Patrimoine au Ministère de la Culture; Agence Urbaine Rabat-salé ; Société d’Aménagement de la Vallée du Bouregreg, Fondation pour la sauvegarde du patrimoine culturel de Rabat). Il s’agit au fait, de voir comment la réflexion derrière a été menée pour justifier l’inscription de la ville de Rabat «Patrimoine Mondial de l’Humanité» et décrire la politique patrimoniale telle qu’elle ressort des dispositions règlementaires relevant du droit de l’urbanisme marocain afin d’esquisser la manière avec laquelle la fabrique mondialisée de ce patrimoine s’est-elle concrétisée. La compréhension de cette dynamique patrimoniale spécifique à la ville de Rabat sera abordée tout d’abord, lors de l’examen de la perspective conceptuelle, sémantique et doctrinale dans laquelle s’inscrivent les trois variables de base : «patrimoine», «patrimonialisation» et «mondialisation».
Du «patrimoine» a «la patrimondialisation» de la ville de Rabat: retour epistemologique et historique
Plusieurs recherches ont posé de pertinentes questions et ont soulevé un riche et long débat sur le concept «patrimoine» et ses élargissements. L’appréhension de la notion a été souvent confrontée au contexte de la mondialisation. E. Fagnoni [2013] rend compte d’une relation radicale entre «patrimoine» et «mondialisation» ayant engendré un processus d’extension de cette variable. En effet, pour M. Gravari-Barbas et V. Veschambre [2005], la préoccupation patrimoniale fait «acte de modernité», ce qui fait qu’elle a significativement gagné en ampleur. Il en découle des concepts adjacents étroitement liées à l’événement de la mondialisation du point de vue de la «diversité culturelle», «démocratisation culturelle»…etc. Une prolifération qui n’échappe cependant pas à une certaine inflation, synonyme de «banalisation du patrimoine» selon N. Heinich [2009].
Toujours est-il, si la notion «patrimoine» est fortement présente depuis longtemps en Europe, le phénomène est encore à ses débuts au Maroc et rare dans les pays arabes, selon M. Berriane [2010]: «La notion de patrimoine et de sa sauvegarde est restée longtemps liée à l’acceptation européenne et surtout française héritée de la période coloniale». Aussi, une différenciation s’est imposée entre «procédure de patrimonialisation» et «processus de patrimonialisation», selon la revue Calenda [2018]:
Tableau 1: Équipe chargée du dossier de proposition d’inscription |
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Coordination du projet |
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Équipe scientifique et technique |
Représentants de l’inspection régionale des monuments historiques et des sites, direction du patrimoine culturel – ministère de la culture, l’école nationle d’architecture de Rabat, ICOMOS, l’institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine, division de l’inventaire et de la documentation du patrimoine. |
Contribution à la réalisation du dossier |
La mairie de rabat, l’agence urbaine de rabat-sale, l’agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie, direction de la cartographie, l’agence pour l’aménagement de la vallée du Bouregreg, le centre régional du tourisme, la direction de la protection civile, le haut-commissariat au plan. |
poisson olivier et Toulier Bernard, conservateurs généraux du patrimoine, direction générale des patrimoines – ministère de la culture et de la communication, France. | |
Source : https://whc.unesco.org/fr/list/1401/ consulté le 05/05/2020 |
Ce type de réflexion résulte d’un construit scientifique plus complexe que le scénario de la Convention de l’Unesco ne le laisse supposer. La reconnaissance patrimoniale est marquée par l’arrivée de «médiateurs» [7] habilités à le faire (tabl. n. 1). Aussi, le processus correspond à ce que M. Rautenberg [2003] entend par « rupture patrimoniale » qui introduit le partage entre le temps où le patrimoine est un simple élément et le présent où il devint reconnu. C’est une procédure de choix et de connaissance de l’objet, laquelle présuppose une réflexivité́ minimale sur sa propre culture avant de la mettre en œuvre. La déclaration du statut de «patrimoine» procède par: «l’étude des manifestations observables afin de construire la liste des propriétés constitutives et des propriétés contingentes de cet objet. […] jusqu’à l’acte juridique ou administratif signant une procédure d’inscription ou de classement» [8] [Davallon 2014].
Classé «Patrimoine Mondial de l’Humanité», l’exemple du centre-ville se révèle particulièrement intéressant pour mobiliser cette connaissance sur le «patrimoine». Centre politique et culturel majeur, ce quartier Rabat-Hassan constitue le cœur historique de la capitale. Il occupe la partie extrême nord de la ville entre la côte Atlantique et l’oued Bouregreg sur un vaste plateau orienté en pente douce vers le littoral. Aussi, il abrite la majorité des sites historiques et patrimoniaux emblématiques de la ville et bénéficie de la présence de 60 bâtiments protégés [9] au titre du Patrimoine architectural moderne du 20ème siècle.
Néanmoins, si la délimitation [10] du périmètre inscrit a été menée dans un souci de représentativité des nombreux éléments de patrimoine, la ville regorge encore d’autres vestiges archéologiques et monuments historiques de valeur méconnus du grand public. Il s’agit par exemple de l’ex-hôpital militaire, Borj es-Sirat, Borj ed-Dar, le phare de Rabat, le château de Moulay er-Rachid (ex-prison el-Alou), la Sqala de Rabat, le rempart maritime auxquels il faudrait ajouter le grand aqueduc d’Ain Ghboula, situé en dehors du périmètre inscrit, construit au 12ème siècle pour alimenter le palais almohade d’Abd Elmoumen à Mehdiya (Actuelle casbah des Oudayas).
En tant que tel, «la ville nouvelle» fut intégrée dans la politique administrative patrimoniale coloniale menée par le Maréchal Lyautey à l’occasion des changements de souveraineté au Maroc. Plus encore, sa généalogie de construction, selon A. Chorfi [2003], fut entrée dans «un processus d’intégration, de renouvellement ou de reconfiguration» qui alimente la réflexion sur la «patrimondialisation» coloniale puis postcoloniale. En effet, la ville européenne (1912-1913) franchit l’enceinte almohade et vient s’accoler à la face nord de la médina. Tout le centre urbain sera disposé autour de «Dar El Maghzen» axe principal allant jusqu’à Bab Zaër qui reçoit les grands équipements centraux de la ville (la poste, la banque du Maroc, le parlement).
Cette conception -issue du premier plan d’aménagement au Maroc – réalisée par Henri Prost (1914) donnera lieu à une logique urbaine qui tient à surpasser l’incompatibilité morphologique des deux tissus, selon l’Unesco (2012): «(un) nouveau mouvement d’urbanisme, témoin d’un dialogue fructueux qui célèbre le passé arabo-musulman et le modernisme occidental». Ainsi, si la médina vient alimenter les façades des bâtiments modernes par des éléments architectoniques traditionnels, c’est la «perspective» – élément de l’urbanisme moderne – qui tracera les lignes directrices des axes structurants la «ville européenne».
Or, la condition imposée par le Maréchal Lyautey, selon G. Gillot [2014], est: «la séparation complète des agglomérations européennes et indigènes […] pour des raisons: politiques, économiques, sanitaires, édilitaires et esthétiques». Des opposants comme M. Ecochard [1930], iront jusqu’à qualifier cet acte, lors du congrès d’urbanisme colonial de 1930, de «tendance déguisée d’une politique de ségrégation raciale» [Fadili-Toutain 2010].
Aujourd’hui, l’enjeu se pose autrement, selon le Directeur du Patrimoine au Ministère de la Culture [2021]:
«La mondialisation renoue les fils des échanges», pour reprendre le mot de C. Grataloup [2008] qui rend compte de l’importance de ce phénomène et de sa dimension géographique dans la compréhension du Monde. Envisagée de cette manière, le label Unesco devient de plus en plus un objet de prestige et de convoitises pour les États soucieux de faire valoir leurs villes afin de les promouvoir sur la scène internationale.
Inscription de Rabat: un processus de patrimonialisation porteur de nouvelles valeurs de partage inscrites a l’ere de la mondialisation
Pour justifier sa valeur universelle, la ville de Rabat a proposé un dossier de candidature au classement Mondial avec un nouveau discours d’action en faveur de son patrimoine. C’est le qualificatif «patrimoine en partage» qui lui a été attribué pour caractériser le savoir transmis de son bien inscrit. Un nouveau régime de patrimonialisation qui reconnait la singularité de l’architecture du centre-ville et de sa composition urbaine. Une juxtaposition d’édifices tout à fait originaux avec des styles modernes intégrant des éléments architectoniques décoratifs propres au style arabo-musulman: le style néo-mauresque, le style éclectique européen, le style art déco géométrique, le style moderniste et le style néo-traditionnel.
En effet, l’équipe pluridisciplinaire chargée du dossier – composé d’architectes, urbanistes, géographes, historiens juristes et archéologues versés dans le patrimoine – a établi une liste de propriétés constitutives contingentes de «l’objet patrimonial idéal», selon l’expression de G. Genette [1994]. «Synthèse entre deux cultures», selon M. Belfkih & A. Fadloullah [1986], cette transposition des savoirs traditionnels a pu faire valoir la richesse et la diversité des artefacts architectoniques marocains selon A. Arrif, 1996 [12]: «alliant ce qu’avait de plus vivant le mouvement moderne à une vision spécifiquement marocaine des formes, des matériaux, de la lumière».
Or, si cette fabrique patrimoniale porte l’interprétation d’un bien jadis conçu par les Français, – occupé jusqu’aujourd’hui par les Marocains – l’approche semble négliger la mémoire «chez la société». Autrement dit, la mise en patrimoine du bien inscrit est différente de la façon dont les citoyens le perçoivent: «Le nouveau centre apparaît aux yeux des Marocains comme la ville des Européens, alors même qu’il est appelé Dar El Maghzen (la maison du Maghzen), qui est aussi le nom donné au palais royal avec les bureaux ministériels qui le prolongent» [Turrel 2003]. S’agit-il, d’une des modalités de «mises en oubli» via «a substitution par l’opposition intentionnelle», pour faire appel à l’harmonie du contenu avec la forme [Robin Azevedo 2013].
Cette orientation a été confirmée par A. Chorfi [2003]:
Encore faut-il pousser les investigations pour voir si l’arsenal juridique et règlementaire marocain a réussi l’équilibre délicat entre d’une part, la possibilité d’assurer la continuité de cet héritage exceptionnel en vis-à-vis des politiques patrimoniales et d’autre part, la nécessité du développement et le devoir de conservation du bien inscrit et sa zone d’inscription.
Inscription de la ville de Rabat sur la liste du patrimoine mondial: un contexte factuel au-dela du cadre legislatif
La ville de Rabat (60 hectares) a fait l’objet de trois plans d’aménagement et de gestion mis à la disposition des acteurs locaux. Le premier couvre la zone intra-muros de la médina. Le second fut le premier document juridique au Maroc ayant été attribué à un tissu moderne [13]. Intitulée «plan d’aménagement et de sauvegarde du patrimoine de la ville de Rabat», il intéresse la «ville Européenne» (146 hectares) et le quartier néo-traditionnel des Habous (4 hectares). Le troisième plan est celui relatif au «plan d’Aménagement spécial du Bouregreg». Il couvre la Vallée du Bouregreg et s’étend de l’estuaire du fleuve jusqu’au barrage «Sidi Mohammed Ben Abdallah» d’une profondeur de 15 kilomètres (6.000 hectares). Sa réalisation relève des attributions de l’Agence pour l’Aménagement de la Vallée du Bouregreg, structure ad-hoc soutenue par le Roi pour contourner l’autorité directe des municipalités concernées.
Ainsi, selon le site officiel de l’Agence, Bouregerg.com:
Une approche sociale est à envisager à ce niveau afin de tisser davantage, les liens entre les deux villes. D’autant plus que le nouveau contexte législatif marocain le permet car il prévoit la contribution obligatoire de la société civile lors de la procédure de classement [14] des monuments et sites historiques et aussi, lors de l’enquête publique dans le cadre de la loi d’urbanisme [15] 12-90 au niveau des plans de sauvegarde. La grande innovation fut celle portée par la loi 16-04 qui oblige le directeur de l’Agence de la Vallée du Bouregreg de renseigner directement l’ensemble des acteurs concernés par le projet.
Finalement, si les plans précédents donnent les grandes orientations en matière de planification urbaine et de gestion patrimoniale du périmètre inscrit, le plan de gestion (2012) est axé uniquement sur le patrimoine et sa mise en valeur. Il répond en premier lieu aux dispositions des conventions internationales ratifiées par l’État marocain avec l’Unesco. Il y a lieu de constater à ce niveau un retard important dans l’exécution des engagements de «la Fondation pour la Sauvegarde du Patrimoine» chargée du plan de gestion de la ville de Rabat (2012). Le rapport de la Cour des comptes (2017) – en se référant à une base de données établie par la direction du patrimoine culturel – a révélé certaines défaillances au niveau du système de sécurité contre les personnes morales et/ou physiques qui ne respectent pas les zones de servitude [16] issues des actes de classement des monuments historiques.
L’approche suppose «intérêt et adhésion sociale» selon Davallon [2014] : «Les acteurs de la patrimonialisation ‘sociale’ doivent affronter celle de la reconnaissance par une instance tierce du statut patrimonial de ‘leur’ patrimoine». Aussi, «le patrimoine restera-t-il l’apanage de spécialistes, le public étant convoqué à la délectation des « grandes œuvres de l’humanité» [Gravari-Barbas, 2014]. La responsabilisation du citoyen dans le processus de patrimonialisation devient de plus en plus, un ressort essentiel devant motiver un large débat au Maroc.
Conclusion
Selon M. Gravari-Barbas [2014]:
C’est dans cette nouvelle optique qu’a pris forme la patrimonialité de la ville de Rabat et ce, pour la 1ère fois dans une ville arabo-musulmane. Sa «ville nouvelle» étant au cœur du dispositif de classement, conjugue deux tissus de styles différents, le traditionnel et le moderne.
Les médiateurs chargés du dossier d’inscription rendent compte d’un «nouvel urbanisme» vérifié dans le cadre des nouvelles connaissances sur «le patrimoine». L’exercice a examiné l’intégrité des formes et l’authenticité du style architectural des bâtiments du centre-ville. En effet, le processus est marqué par un glissement des logiques de patrimonialité vers une appréhension centrée sur les potentialités immatérielles de l’objet architectural. Ainsi, prend forme ce nouveau régime de patrimonialité, caractérisé par de nouvelles valeurs, de nouvelles fonctions et significations formulées sous l’intitule de «Patrimoine en Partage».
Cela suppose une approche constructive qui dépasse les contraintes d’un régime patrimonial basé uniquement sur la protection. Preuves en sont les rebondissements parvenus par l’UNESCO [17] contre le plus haut building d’Afrique de la Tour Mohammed VI et la nouvelle extension de la gare de Rabat-Ville. Cette reconfiguration scientifique de la ville de Rabat, affectant la nature du patrimoine, se doit d’être composée avec une appréhension renouvelée des problématiques et défis sous-jacents interpelées par les mutations rapides de la société dans un nouveau contexte mondial marqué par l’accroissement des objets patrimonialisés et l’accélération de la patrimonialisation.
En tant que tel, cette nouvelle conception «patri-mondiale» de l’État marocain n’irait-elle pas au même titre que les nouvelles logiques de patrimonialisation à une vraie démocratisation patrimoniale? Autrement dit, ne devrait-elle pas engager la recherche sur la voie d’un renouvellement épistémologique? est-ce que les sciences classiques qui ont conduit à «produire» ce patrimoine ne risquent-elles pas d’être substituées par les disciplines qui observent la patrimonialisation et ses conséquences telles les sciences politiques? Faudrait-il admettre que l’un des enjeux des savoirs académiques aujourd’hui est de parvenir à renouveler leurs questionnements sur le sujet?
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